Court métrage - FOCUS
Georges Schwizgebel et la peinture animée
PORTRAIT DE GEORGES SCHWIZGEBEL
Né en 1944 à Reconvilier, en Suisse le cinéaste d’animation Georges Schwizgebel est l’auteur d’une œuvre remarquable, l’une des plus originales de la création contemporaine. Exécuté avec une grande virtuosité, son travail se caractérise par une approche narrative ludique et un formalisme spectaculaire intégrant des considérations picturales et musicales.
Après une formation aux Beaux-Arts puis à l’Ecole des arts décoratifs pour apprendre le métier de graphiste, Georges Schwizgebel fonde, avec les cinéastes Daniel Suter et Claude Luyet, le studio GDS à Genève en 1971. Son court métrage Le vol d’Icare (1974) amorce une carrière riche de 16 films qui feront l’objet de rétrospectives nombreuses et qui lui vaudront de nombreux prix dans les festivals internationaux (Cannes, Annecy, Zagreb, Hiroshima, Stuttgart, Ottawa et Espinho, notamment). Il utilise la rotoscopie dans ses premiers films, puis délaisse cette technique au profit d’une gestuelle plus libre appuyant d’étonnantes constructions narratives. La course à l’abîme (1994) est ainsi régulièrement cité par les spécialistes comme l’un des meilleurs films d’animation de tous les temps. En 2004, Georges Schwizgebel entreprend une série de coproductions avec l’ONF qui totalise aujourd’hui quatre films, soient L’homme sans ombre (2004), Jeu (2006), Retouches (2008) et Romance (2011).
(source : http://onf-nfb.gc.ca/medias/mediakit/romancecinefichebilingue.pdf)
FILMOGRAPHIE
2017 LA BATAILLE DE SAN ROMANO
2015 ERLKÖNIG
2012 1/3/10
2012 CHEMIN FAISANT
2011 ROMANCE
2008 RETOUCHES
2007 ANIMATOU, CORÉALISATION
2006 JEU
2004 L’HOMME SANS OMBRE
1998 LA JEUNE FILLE ET LES NUAGES
1996 ZIG ZAG
1996 CYCLADES CORÉALISATION
1995 L’ANNEE DU DAIM
1992 LA COURSE A L’ABIME
1989 LE SUJET DU TABLEAU
1987 ACADEMY LEADER VARIATION, CORÉALISATION
1986 NAKOUNINE’
1985 78 TOURS
1982 LE RAVISSEMENT DE FRANK N. STEIN
1977 HORS-JEU
1975 PERSPECTIVES
1974 LE VOL D’ICARE
EXTRAIT D'UNE INTERVIEW
réalisée par Olivier Cotte
Utilises-tu souvent la prise de vue réelle comme auxiliaire pour tes animations?
On a
souvent parlé de rotoscope... J’ai utilisé la prise de vue réelle pour tout Perspectives et
Hors jeu, et évidemment pour la fin de Frank N. Stein (tiré du film La fiancée de Frankenstein,
avec Boris Karlof et Elsa Lanchester). Je l’ai aussi utilisée pour quelques parties de 78 Tours (la
fillette sur le manège, les manèges, l’ombre sur le visage et le couple qui danse). Pour Le sujet
du tableau, je l’ai utilisée pour les vagues, les canards sur l’eau et le rideau agité par le vent. Je
crois que c’est tout, je n’ai plus utilisée cette technique par la suite et je ne l’avais pas utilisée
pour Le vol d’Icare.
Bien qu’il y ait parfois des scénario à la base de tes films, le découpage n’est pas organisé
de manière traditionnelle pour raconter. Par exemple, il y a très peu de ‘cut’ dans tes
films, mais plutôt de larges mouvements de caméra qui lissent les idées, les situations.
Pourquoi coupes-tu si peu?
C’est presque un échec de devoir faire un cut. Moi, j’aime bien
que ce soit un plan séquence. J’aimerais arriver à enchaîner les plans dans un film avec la même
aisance et la même logique qu’on trouve dans un rêve. Parfois, on est obligé de faire une coupure
pour que le récit soit compréhensible. C’est le cas dans L’année du daim. Il y a même des fixes
dans ce film, mais qui sont ponctués de manière régulière.
Comment trouves-tu tes transitions entre différents éléments à montrer?
Paradoxalement,
le montage est quasiment la première étape dans la réalisation du film. Je cherche d’abord les
scènes (les images) et leur succession, pour arriver à un long plan séquence.
Très souvent dans tes films, seuls quelques thèmes sont utilisés et s’enchevêtrent. Ils
peuvent être liés à la couleur, être constitués par des lieux ou des objets, des actions...
Et ils sont développés à la manière d’un contrepoint musical: je voulais savoir si c’est
conscient.
Oui, c’est volontaire. Il y a un sujet dans les films, mais c’est un prétexte. Ce qui
m’intéresse vraiment, c’est d’explorer des directions formelles, (que le film soit divisé en quatre
par exemple), et si possible de traiter un thème de façon insolite. C’est volontaire qu’il y ait plusieurs histoires, plusieurs lectures. Même dans L’homme sans ombre, qui est narratif, il y a un
certain style d’animation au début, puis un autre pour le corps du film et un troisième pour la
dernière partie.
LA PEINTURE ANIMÉE CHEZ GEORGES SCHWIZGEBEL
Les différentes thématiques à étudier sur la peinture animée chez Georges Schwizgebel sont les suivantes :
LA MUSIQUE
La musique intervient comme fondement de l'écriture. Ce sont des films sans dialogues où la musique s'étend sur toute la durée du film. La construction narrative est donc principalement conçu par la trame musicale. La musique ne se contente pas ici d'illustrer. Ainsi, dans le bien nommé Fugue, les différents éléments narratifs s’assemblent à la manière d’un contrepoint; ou encore dans L’année du daim, la structure en 4 parties est jalonnée des moments musicaux représentant autant de repères scénaristiques.
Des événements sonores peuvent même intervenir comme compléments décalés de la trame sonore principal (dans La jeune fille et les nuages, nous pouvons entendre de curieux sons ressemblant à des accidents parfaits permettant de faire vivre l’œuvre pianistique de Mendelssohn en enrichissant sa perfection). Aux côtés de ces utilisations de matériaux musicaux prééxistants, Schwizgebel fait également appel à des artistes contemporains pour composer ex-pressément la bande son de certains de ses films. C’est le cas par exemple pour Le ravissement de Frank N. Stein, dont la trame sonore a été réalisée avec les mêmes bases scénaristiques, les mêmes structures pourrions-nous dire, que le film. Ou pour Le sujet du tableau
ou encore pour Fugue. Ce désir de collaborer, indépendamment qu’il permet à l’artiste de sortir
de l’inéluctable solitude de l’animateur seul maître de son œuvre alchimique, lui offre la possibilité
de s’aventurer dans des territoires musicalement plus contemporains et de s’ouvrir à de nouveaux
styles. Ce type d’échange n’est toutefois pas la norme tant la peur que la musique ne fonctionne
pas suffisamment bien au final est fortement ancrée chez Schwizgebel.
→ Ecriture avec la musique : rencontre avec Georges Schwizgebel
LES CYCLES
Les cycles est un élément constitutif majeur du cinéma d'animation. L'idée étant de chercher un moyen d'économiser du temps. Chez Georges Schwizgebel, les cycles sont utilisés d'une manière intelligente. Il joue avec.
LE MOUVEMENT DANS L'ESPACE
Georges Schwizgebel est un cinéaste du mouvement perpétuel, ça bouge tout le temps. Ces films se caractérisent par des mouvements dessinés, c'est le dessin qui génère l'espace.
LA METAMORPHOSE
La métamorphose permet des transitions sans cut net mais par des transformations.
« Schwizgebel est un peintre sur
toile d’une grande sensibilité
musicale. D’un coup de pinceau
net, il crée des univers de transition et de passage, des œuvres
d’art lyriques globales. En une
métamorphose continuelle et
infinie, chaque image se transforme en une autre, une image
arrêtée se fait mouvement, qui
surmonte sans peine les limites
temporelles et spatiales.»
Thomas Allenbach, WOZ, 200
→ Un reportage très complet autour Georges Schwizgebel : l’art de la métamorphose (Animétrage)
LA COULEUR
La gamme de couleur
développée par Georges Schwizgebel est très personnelle, malgré ses variations d’un film à l’autre,
et presque entièrement constituée de couleurs vives qui s’opposent en complémentaires. L’impact
visuel est renforcé par le choix des fonds qui, constitués de dégradés dans les premières produc-
tions, s’assombrissent ensuite pour devenir totalement animés afin que les personnages mouvants
dans le cadre ne se découpent plus sur un arrière-plan fixe.
Les couleurs dominants sont le vert olive, le rouge brique, le bleu pervenche, le noir. Toutes ces couleurs utilisées principalement en peinture acrylique passé à la brosse dur.
POUR ALLER PLUS LOIN
→ ETUDE APPROFONDIE DU FILM L'HOMME SANS OMBRE
→ Un dossier très complet et une interview réalisée par Swiss Films
→ Un entretien avec Georges Schwizgebel avec des questions de Laurence Gogniat
→ Un reportage très complet autour Georges Schwizgebel : l’art de la métamorphose (Animétrage)
→ RETOUCHES : une Entrevue avec Georges Schwizgebel
→ Georges Schwizgebel à la Cinémathèque suisse, discusion à l’issue de la projection de ses films
→ Une courte vidéo dans laquelle Georges Schwizgebel explique son travail
→ Ecriture avec la musique : rencontre avec Georges Schwizgebel
→ Masterclass de Georges Schwizgebel lors de la 40ème édition du Festival de Court métrage de Clermont Ferrand (2018)
→ Le site du studio GDS
D'autres cinéastes sont comme Georges Schwizgebel des tenants d'un cinéma d'animation à forte dominante picturale comme Florence Miailhe en France, Frédéric Back ou Caroline Leaf au Canada, Joan Gratz au États-Unis, Kathy Smith en Australie ou encore le russe Alexander Petrov. Il est à noter qu'ils sont tous, en parallèle de leur travail de cinéastes d'animation, illustrateurs ou peintres.
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